Hermès et Thot : L'Assimilation Gréco-Égyptienne
Les Grecs, suivant le principe de l'interpretatio graeca, ont fait une assimilation de Hermès leur dieu à Thot la divignité du savoir Égyptien. Cette assimilation s'est matérialisée notamment à Moyenne-Égypte, où Khemenou est devenu Hermopolis Magna. Des preuves de cette assimilation sont visibles dans des textes officiels datant de l'époque des Ptolémées, Comme le stipule le décret consigné sur la Pierre de Rosette, qui date de 196 av. J.-C., rédigé à l'initiative de l'assemblée des prêtres égyptiens, le texte grec fait référence à Hermès, tandis que le texte égyptien mentionne Thot.
La figure d'Hermès Trismégiste reflète deux fonctions attribuées au dieu Thot : celle de rassembleur, notamment illustrée par son aide à Isis pour ressusciter les membres d'Osiris, et celle de mainteneur, en tant que secrétaire des dieux.
Au fil du temps, plusieurs sages égyptiens ont été associé à Thot, puis à l'entité fusionnée Hermès-Thot. Des représentations de figures telles qu'Imhotep, Amenhotep fils de Hapou et Teôs ont été retrouvées dans des temples dédiés à Thot-Hermès, particulièrement à l'époque ptolémaïque.
Selon l'historien grec Hécatée d'Abdère du ive siècle avant notre ère, Thot-Hermès est l'inventeur de l'écriture, de l'astronomie, de la musique (la lyre) et de la culture de l'olivier.
Au environs des années 200 av. J.-C., Artapan un Juif a associé Moïse à Thot-Hermès , le considérant comme celui qui a enseigné diverses disciplines aux Égyptiens, y compris la navigation, la construction, l'armement, l'irrigation, la mécanique et la philosophie.
Les Multiples Visages d'Hermès Trismégiste
La transformation d'une divinité en un être mythologique a donné naissance à une multiplicité d'Hermès au fil du temps.
La généalogie hellénistique la plus courante, datant des IIIe ou IIe siècles avant notre ère, identifie le premier personnage comme une figure équivalente à Thot. Son fils, également notable, engendre un deuxième personnage, dont le descendant est Tat. C’est ce deuxième personnage qui sera connu sous le nom de Trismégiste à partir du IIe siècle de notre ère.
L'origine du titre Trismégiste, qui se traduit par « trois fois grand », est encore mystérieuse. Il semble que ce titre soit issu de la répétition de l’expression « très grand » en lien avec le nom du dieu égyptien. Cette désignation est documentée dans des inscriptions trouvées dans un temple égyptien et dans un texte démotique relatant un conseil religieux près de Memphis en 172 av. J.-C. Les premières mentions en grec viennent de philosophes connus de l’époque.
Dans un ouvrage romain datant de -45, l'existence de plusieurs figures assimilées à Mercure est rapportée, en désignant l'une d'entre elles comme ayant trouvé refuge en Égypte après avoir commis un acte violent.
Une légende populaire, attribuée à un astrologue perse du IXe siècle et suivie par d'autres érudits, présente trois personnages distincts. Le premier serait un ancêtre ayant vécu en Égypte avant un grand déluge. Le deuxième aurait vécu après un autre déluge, maîtrisant plusieurs disciplines et enseignant à un célèbre philosophe. Le troisième aurait résidé en Égypte, se distinguant dans l'étude de la nature, de la médecine, et de l'alchimie.
La Sagesse Infinie d'Hermès Trismégiste
Clément d'Alexandrie, vers 150/215, révèle l'existence de quarante-deux ouvrages attribués à Hermès Trismégiste. Trente-six de ces livres renferment la totalité de la philosophie égyptienne, tandis que les six autres traitent de médecine. Ces écrits sont considérés comme d'une importance capitale, constituant un ensemble de connaissances essentielles, dont la maîtrise est requise par les prêtres.
Dans les Mystères de l'Égypte, rédigés vers 320, Jamblique souligne le rôle prépondérant d'Hermès, considéré comme le guide vers la véritable science. Selon lui, Hermès est universellement vénéré par les prêtres, car il est le dépositaire de la parole sacrée et détient la clé de la connaissance authentique.
Il est rapporté que Séleucos d'Alexandrie aurait recopié vingt mille de ces ouvrages, tandis que Manéthon en aurait recensé trente-six mille cinq cent vingt-cinq, un nombre peut-être lié à l'apparition héliaque de Sirius, appelé Sothis par les Égyptiens.
Vers le milieu du IIIe siècle, Lactance décrit Hermès Trismégiste comme un homme d'une sagesse si ancienne qu'il a reçu le titre de "Trismégiste", signifiant "Trois fois Grand". Hermès, auteur de nombreux ouvrages sur la connaissance divine, proclame l'existence d'un Dieu unique, utilisant les termes "Dieu" et "Père". Dans l'Asclépius, Hermès évoque la création divine et l'amour de Dieu pour son œuvre, considérant chaque élément de l'univers comme une partie intégrante de Lui. Lactance, s'appuyant sur Cicéron, affirme que le titre de Trismégiste est attribué à Hermès en raison de son excellence dans tous les arts et le place parmi les prophètes ayant préparé le terrain pour le christianisme. Au Moyen Âge, des penseurs comme Thierry de Chartres et Nicolas de Cues continuent de faire référence à Hermès pour souligner la profondeur de sa sagesse. Roger Bacon, quant à lui, considère Hermès comme "Triple" en raison de sa maîtrise des philosophies naturelle, morale et métaphysique, intégrant ainsi l'alchimie à son enseignement.
Hermès Trismégiste : Source d'Inspiration à Travers les Âges
Hermès Trismégiste a exercé une influence profonde à travers les siècles. Thierry de Chartres, dans son Traité des six jours, et Nicolas de Cues, dans La Docte Ignorance, se réfèrent tous deux à Hermès Trismégiste et à l’Asclépius pour souligner la richesse de la sagesse hermétique. Thierry met en avant la profondeur des connaissances d'Hermès, tandis que Nicolas explore les mystères de la connaissance et de l’ignorance dans ses écrits.
Pour Roger Bacon, qui a traduit et commenté le Secretum Secretorum, Hermès est qualifié de "Triple" en raison de sa maîtrise des philosophies naturelle, morale et métaphysique. Bacon considère l’alchimie comme une partie intégrante de la philosophie naturelle d'Hermès, enrichissant ainsi son enseignement.
À la Renaissance, Marsile Ficin traduit le Corpus Hermeticum en latin en 1461, expliquant que le titre de Trismégiste attribué à Hermès reflète son excellence en tant que philosophe, prêtre et roi. Ficin associe Hermès à Platon, les voyant comme les premiers théologiens antiques avant des figures comme Orphée et Pythagore.
L’idée qu’Hermès soit le père de l’alchimie se renforce à la Renaissance, surtout avec la découverte d'écrits attribués à Hermès sous Cosme de Médicis. Un Livre sur philosophie naturelle des métaux, prétendument rédigé par Bernard le Trévisan, attribue à Hermès la compréhension des trois aspects de la philosophie naturelle : minérale, végétale et animale.
La figure d'Hermès Trismégiste inspire également la littérature et la musique. Charles Baudelaire le mentionne dans son poème Alchimie de la douleur, et Guillaume Apollinaire parle d'un "arlequin trismégiste" dans Crépuscule. En musique contemporaine, le rappeur Scylla fait référence à Hermès Trismégiste dans sa chanson Qui suis-je ?, montrant l’impact persistant de cette figure légendaire sur la culture moderne.
En somme, Hermès Trismégiste reste une figure fascinante, dont l’héritage traverse les âges. De ses origines gréco-égyptiennes à son rôle dans l’alchimie et sa présence dans divers domaines culturels, il continue d'inspirer et d'intriguer. Hermès Trismégiste est ainsi une source inépuisable de réflexion et d'inspiration pour ceux qui cherchent à explorer les mystères de l’univers et de la conscience.
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